Bienvenue au 80e

« Philo sans fumée »

de février 2007

Bonjour à tous!

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1.     NOUVELLES DE PHILO5

*      Un nouveau philosophe s'ajoute : Gilles Deleuze

*      Textes originaux de Wittgenstein, Bachelard et Beauvoir

*      Philo5 exposera à La nuit de la philosophie / 24 heures

2.     SUJETS DU MOIS  : EFFET LARSEN PHILOSOPHIQUE

3.     PHILOSOPHE DU MOIS  : MONTESQUIEU

4.     LES QUESTIONS PHILOSOPHIQUES  : QUESTIONNAIRES DE MARCEL PROUST ET DE BERNARD PIVOT

5.     QUELQUES LIVRES REMARQUABLES  : HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE MODERNE, KAMA SUTRA et GOUROU DE SECOURS

6.     MAGAZINE  : SPÉCIAL SAINT-VALENTIN

7.     RIRE ET S'ATTENDRIR  : RÉVERSA : PUBLICITÉ AUDACIEUSE

8.     PENSÉES DU MOIS  : ANDRÉ MAUROIS

9.     POUR LES NOUVEAUX PARTICIPANTS...  : Écrivez-moi vos réflexions...

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1 – N O U V E L L E S   D E   P H I L O 5

Un nouveau philosophe s'ajoute : Gilles Deleuze

 Gilles Deleuze pourrait bien devenir le plus grand philosophe du XXe siècle. Pourquoi? Parce qu'il a proposé une manière tout à fait originale d'aborder la philosophie... et qui marche : l'immanence radicale. Il l'oppose à la transcendance des Platon, Descartes et Hegel qui régnait, et règne encore sur la philosophie depuis 3500 ans. Ambitieux programme me direz-vous, mais il a eu un précurseur de taille en Nietzsche. Mais de quoi s'agit-il? Il s'agit de retirer aux prêtres traditionnels de la philosophie leur auréole transcendante pour reconnaître la philosophie tout simplement pour ce qu'elle est : production de concepts. Chaque philosophe n'a pas une connexion privilégiée avec une entité métaphysique qui lui inspire la « Vérité » mais est tout simplement inspiré par une idée originale comme un inventeur. Sa tache consiste alors à développer le concept original dont il a eu l'idée pour en faire un système cohérent, une nouvelle vision du monde, une parmi d'autres. Ainsi, dans sa réponse originale à la question « Qu'est-ce que la philosophie?  », Deleuze l'a en quelque sorte redonnée à tout le monde, puisque chacun peut se concevoir comme faisant partie de la grande famille de producteurs des concepts, pour peu qu'il prenne une part active dans les idées qui l'animent.

 

Textes originaux des philosophes

 Je vous offre ce mois-ci les textes fondateurs de la pensée de trois philosophes

1.      Wittgenstein : Langage . Ludwig Wittgenstein est un philosophe difficile parce qu'il essaie de nous faire comprendre que nous vivons dans le langage comme un poisson vit dans l'eau sans le savoir. Il a formulé dans sa vie deux philosophies du langage. Pour expliquer la première – ayant besoin de certitudes comme Descartes et négligeant la maïeutique de Socrate – il a écrit un essai, le Tractatus logico-philosophicus sur le seul style de l'affirmation. La première philosophie de Wittgenstein ne fait pas dans la nuance et le compromis. Il nous dit, appuyé d'une pensée logique et mathématique irréfutable, tout ce que le langage peut dire et conclut en nous invitant à nous taire pour le reste. Ses détracteurs ont inventé la formule « Ce n'est pas parce qu'on a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule.» Mais l'argument de notre philosophe est de taille : Nous ne pouvons parler que de ce qui est dans le monde. Sa deuxième philosophie est plus nuancée. Il note que le langage peut avoir plusieurs usages – autres que la logique mathématique – qu'il appelle Jeux de langage. Ainsi, autres que la description froide, logique et lucide du monde, le langage peut aussi avoir d'autres usages.

2.      Bachelard : Rupture épistémologique . L'originalité de la philosophie de Gaston Bachelard tient au fait qu'il se détache de la traditionnelle accumulation de savoir pour regarder la science comme une suite de ruptures dans la connaissance. On sait quelque chose jusqu'à ce que ce savoir ne puisse plus résister aux pressions qui cherchent à le réfuter. S'installe alors un nouveau savoir qui, pour un temps devra résister aux critiques scientifiques, et ainsi de suite. Bachelard trucide l'opinion. Il nous explique pourquoi l'esprit scientifique s'y oppose farouchement. Bachelard est le philosophe de l'épistémologie, la science qui s'intéresse au processus qui crée la science.

3.      Simone de Beauvoir : On ne naît pas femme, on le devient . Beauvoir est une philosophe à qui les femmes d'aujourd'hui doivent beaucoup. C'est elle qui a donné au féminisme ses lettres de noblesses. Bien que la pensée féministe fut dans l'air depuis la Révolution Française avec Olympe de Gouges, aucune femme n'avait eu l'occasion de pouvoir l'articuler et l'imposer avec autant de force. Beauvoir fait de la femme un être distinct. Après elle, il sera difficile d'utiliser le vocable homme comme nom générique s'appliquant à toute l'humanité. Grâce à elle, l'humanité est désormais scindée en deux et, paradoxalement, égalitaire : il existe une pensée femme mais celle-ci ayant les mêmes droits humains que ceux de l'homme, elle doit pouvoir s'exprimer comme bon lui semble, c'est-à-dire être libre d'agir et de penser en « homme » ou en « femme » indifféremment selon son libre choix et sa propre volonté. Une société libre et égalitaire, n'a pas à imposer de stéréotypes féminins  raciaux ou homosexuels ; c'est à chacun de choisir librement les valeurs auxquelles il veut appartenir. Beauvoir propulse la notion de tolérance vers des sommets qu'on n'aurait jamais cru possibles. Elle a donné le coup d'envoi à une mutation sociale profonde ; après elle, le monde ne sera jamais plus comme avant.

 

Philo5 exposera à La Nuit de la Philosophie / 24 heures

 La nuit de la philosophie est un événement annuel organisé par les étudiants du département de philosophie de l'Université du Québec à Montréal (UQÀM). C'est un peu comme le salon de l'automobile mais on y a remplacé les autos par des idées. C'est génial, parce qu'avec des idées, on peut visiter des mondes autrement impossibles à accéder autrement. Pendant 24 heures continues, on y présente tout ce qu'il est possible d'imaginer en philosophie : conférences, expositions, lectures, films, jeux, forums, cafés ; j'en passe et des meilleures. L'entrée est libre et gratuite. Philo5 participera pour la première fois en exposant Les philosophes. Surveillez les détails dans le prochain bulletin « Philo sans fumée »

 

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2 S U J E T   D U   M O I S   :

Je vous invite ce mois-ci à me partager votre réflexion sur un sujets auquel je réfléchis depuis près d'un an. Voici 4 textes où j'essaie d'explorer la notion d'effet Larsen philosophique :

1. Effet Larsen philosophique

2. La philosophie comme art de se taire

3. Bribes et contextes : l'indicible

4. Effet Larsen Internet

La respiration est la seule action motrice de notre corps qui continue de manière autonome si on ne s'en charge pas volontairement. Pour la pensée, c'est pareil. Il existe un lieu dans notre esprit où la pensée s'emballe et prolifère toute seule si on ne la dirige pas volontairement. Elle s'accroisse sans qu'on y participe en s'alimentant de bribes éparses, d'arrêts sur image, de clips médiatiques, mêlant sons, paroles, concepts, images et émotions un peu comme l'illustre parfois la musique concrète. Cet état peut nous mener dans toutes sortes d'émotions ; nous sommes ainsi livrés à une sorte d'ivresse mentale où notre pensée s'éparpille en toute liberté. Parfois une idée se fait plus insistante et s'emballe pour créer un véritable effet Larsen philosophique.

Si ce thème vous inspire, écrivez-moi votre expérience.

 

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3 L E   P H I L O S O P H E   D U   M O I S   :

Montesquieu

Quand on baigne dans l'eau de son époque, on imagine mal le parcours qu'il a fallu à l'occident pour établir le type de gestion légale qui a cours actuellement. La liberté individuelle qui prévaut aujourd'hui serait impensable sans l'apport de Montesquieu. Celui-ci préconisa la séparation des trois pouvoirs  qui, traditionnellement, étaient dévolus au monarque et/ou à l'Église. Il s'agit des pouvoirs législatifs (faire des lois), exécutif (assurer la sécurité de l'État) et judiciaire (juger et punir les contrevenants). Ce philosophe et écrivain français vit à la veille de la Révolution Française et va concourir aux idéaux qui lui préparent le terrain. Nous pensons souvent que notre façon de gouverner nos républiques « démocratiques » est la meilleure surtout quand nous sommes confrontés à l'expansionnisme, qu'il soit états-unien d'Amérique ou Islamique. On fustige le despotisme et la monarchie mais on aime bien profiter des prix « Made in China » et du pétrole saoudien et iranien. Pourtant Montesquieu nous avait dit que toute forme de gestion est bonne pourvu qu'elle soit modérée.

 

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4 – L E S   Q U E S T I O N S   P H I L O S O P H I Q U E S

Questionnaires de

Marcel Proust

et de Bernard Pivot

 

Est-ce que les questions de Marcel Proust et de Bernard Pivot sont philosophiques?

 

 

 

Comme nous l'avons déjà vu, toutes les questions ne sont pas philosophiques. La question philosophique, se doit de susciter plusieurs réponses possibles. Une question qui n'a qu'une seule réponse ou ne concerne qu'un seul individu n'a pas l'universalité nécessaire pour qu'on lui accorde le statut de « philosophique ». Ceci dit, amusez-vous à répondre à l'un ou l'autre questionnaire de votre choix et passez-le aussi à vos amis. Comparez ensuite vos réponses et observez le portrait qui s'en dégage. Vous verrez peut-être surgir la philosophie là où on n'aurait pas cru possible.

 

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5 – Q U E L Q U E S   L I V R E S   R E M A R Q U A B L E S

Histoire de la philosophie moderne, Luciano De Crescenzo

Éd. de Fallois © 2006

Avec cette dernière parution en langue française, notre philosophe napolitain continue son épopée philosophique. De Nicolas de Cuse à Emmanuel Kant, il dresse maintenant le portrait de chacun de tous les philosophes de la Renaissance et des Lumières. Cette fois-ci, il a trouvé une formule équilibrée en trois temps : d'abord une brève biographie du philosophe et quelques anecdotes personnelles ; ensuite une explication succincte de l'originalité de son apport à la philosophie ; et il termine par un « à propos de » où il nous raconte ce que ce philosophe lui a inspiré personnellement dans sa propre vie. En moins de six pages, on a couvert l'essentiel sur chaque philosophe. Avec sa charmante modestie et son ton bon enfant c'est du gâteau! Pour moi, De Crescenzo à lui tout seul rachète des millénaires d'obscurantisme philosophique où le jeu de la pensée a trop consisté à discourir et mystifier savamment. Enfin un philosophe qui n'a qu'un seul but : redonner à tous les clefs des philosophes. Comme il avance en âge (il est né en 1928) il ne nous reste qu'à lui souhaiter la santé et la longévité nécessaire pour qu'il puisse continuer son œuvre et couvrir tous les philosophe jusqu'à aujourd'hui.

 

Kama Sutra, Anne Johnson

Éd. Sélection du Reader's Digest © 2000

Le Kama Sutra (qui signifie Science du plaisir) est un classique dont l'auteur, Mallanaga Vatsyayana, vivait à Pataliputra au nord de l'Inde à vers le IVe siècle de notre ère. L'auteur n'a bien sûr pas créé une œuvre originale mais compilé la sagesse érotique de plusieurs ouvrages. Si la chrétienté n'avait pas de sexe ou encore qu'une sexualité coupable, l'Inde avait précédé notre « révolution sexuelle » de 15 siècles. On trouve dans ce livre un exposé complet illustré d'images explicites qui ne passe rien sous silence. L'art de la séduction, la virginité, l'acte d'amour, le format des organes, l'hygiène, les fruits défendus, le mariage d'amour, la vie de courtisane, l'épouse d'autrui, l'homosexualité, l'amour à plusieurs les potions tonifiantes, bref, tout ce qui dans nos esprits chrétiens nous pousse à la gène y est expliqué dans un langage clair et fait bon ménage avec le sacré. En fait, il s'agit d'un traité sur l'art de vivre destiné au citadin raffiné, civilisé et aisé. Anne Johnson prend bien soin de préciser dans son introduction qu'il ne s'agit pas d'un ouvrage pornographique, mais d'un bréviaire de l'amour. Cependant, à regarder certaines illustrations, (comme ci-haut p.78), je me suis demandé « qu'est-ce que la pornographie ?» Qu'en pensez-vous?

 

Gourou de secours (Petit manuel de réparation spirituelle), Philippe Lheureux

Éd. JMG © 2006

Petit essai sympathique où l'auteur nous livre ses réflexions personnelles sur les différents sujets qui le préoccupent : philosophie, sectes, médias, tabagisme, réincarnation, Dieu, la théorie des complots, le but de la vie, l'univers, etc. Avec un brin d'humour, il nous emmène dans son univers intérieur principalement alimenté des thèmes les plus populaires et cherche plus ou moins ouvertement à nous vendre ses opinions espérant qu'elles puissent être, le cas échéant, de quelque secours. Grand frère qui s'adresse à son jeune frangin de 15 ans, il a glané de-ci de-là quelques idées intéressantes et s'avère de bon conseil. Ma foi, combien de philosophes nous apparaissent ainsi! En voici un de plus.

J'ai lu plusieurs livres analogues qui m'ont parfois même été confiés par leur auteur personnellement. Celui-ci m'aurait semblé banal s'il ne m'avait été recommandé par une amie sympathique qui disait m'avoir trouvé des affinités avec le discours de Philippe Lheureux. J'étais curieux de me reconnaître dans ce miroir livresque. Je dois admettre que je partage quelques unes de ses opinions dont celles sur le tabagisme mais suis-je en mal d'aider les autres? Si c'est ainsi que je suis perçu, je me suis mal fait comprendre.

Toute pensée est un mème qui cherche à se propager. Ainsi, la tentation est forte d'écrire comme pour prévenir de nos bons conseils ceux qui pourraient être sur le point de vivre nos anciennes mésaventures, ou encore, essayer d'influencer les autres de ce que nous pensons être « génial ». Mais, à l'extérieur du groupe cible des 13-17 ans, j'ai du mal à croire que ces bonnes intentions puissent toucher le but visé, et encore... Avons-nous la sagesse de suivre les « bons conseils »? Chacun n'a-t-il pas à vivre sa vie? Dans ce monde autonomiste où Dieu est disparu depuis belle lurette, nous laissant seul maître à bord de notre vie, qu'avons-nous à faire des idées d'un quidam bien intentionné? De plus, le contexte nous faisant apparaître une idée « géniale » n'est généralement pas partagé : les autres la reçoivent souvent comme un pétard mouillé. Alors donc, pourquoi écrire? Pourquoi présenter nos écrits sur la place publique? Pourquoi je m'écris?

 

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6 – M A G A Z I N E

 

Les deux magazines qui suivent sont parus au même moment l'été dernier (juillet-août 2006), mais j'ai pensé qu'il serait plus opportun d'attendre la Saint-Valentin pour les présenter. Parlons donc sexe, érotisme, prostitution et désir.

 

Sade, Bataille, Apollinaire, Ovide... Les textes fondamentaux de l'érotisme

Le Point – Hors-Série #9 – juillet-août 2006

Ce magazine est bien plus qu'un magazine, c'est un livre, une référence. Il nous offre une collection de textes d'une variété de provenance surprenante. Toutes les époques y passent. Antiquité grecque et romaine, Moyen-Âge, Renaissance, 17, 18, 19 et 20e siècles, les Mille et Une Nuits de l'Islam, la Bible, le Coran, l'Asie avec le tantrisme et le Kama Sutra indiens et les grands textes érotiques chinois, rien ne manque. Il comprend même une enquête sur l'érotisme actuel. Saviez-vous que 70% des transactions monétaires faites sur l'Internet sont pour le cul? Ainsi donc, en ce début du 21e siècle, de tous les dieux et déesses, il semble que Aphrodite et Vénus soient les plus vénérées. Mais si nous nous livrons à diverses activités sexuelles sans même penser à ces divins modèles, pourquoi donc les anciens grecs en avaient-ils besoin pour inciter les citoyens à leur livrer un juste culte? Il semble que le sexe procréateur avait une bien petite place chez eux. « En Grèce et à Rome l'amour n'est pas naturel », nous dit Florence Dupont. Elle ajoute : « En Grèce, sans Aphrodite et sans Éros, le genre humain ignorerait le désir et se serait éteint faute de descendance. » En effet, l'homosexualité et la pédérastie occupaient le haut du pavé. Et n'allez pas penser « pédophilie » ; à cette époque les activités sexuelles étaient considérées normales dès la puberté. Michel Foucault nous avait dit que pour comprendre les autres époques, il faut bien se mettre dans la tête que les mêmes mots ne veulent pas dire la même chose. Quand l'homosexualité est la norme, baiser l'autre sexe est vu comme bizarre et, par les temps qui courent, je ne serais pas étonné que l'on en vienne bientôt à comprendre les anciens grecs dans leurs mœurs.

 

Prostitution... L'histoire du plus vieux métier du monde

Des lupanars de Pompéi aux lois Sarkozy

Historia #102 – Thématique – juillet-août 2006

Si les sociétés occidentales de notre époque réprouvent généralement la prostitution à la manière Sarkozy, créant ainsi des conditions de travail pénibles aux péripatéticiennes, il n'en a pas toujours été ainsi, loin de là. Il fut même un temps, où les filles publiques étaient un service fourni par l'État. En effet, à Athènes, trois siècles avant notre ère, Philémon (-361/-262) rapporte que « Voyant dans notre ville beaucoup de jeunes gens qui, sous l'empire d'impulsions naturelles, s'égaraient sous de mauvaises voies, Solon fit l'acquisition de femmes, les installa dans différents quartiers de la cité pour les offrir à tout le monde ». Il fut aussi un temps où la prostitution était une activité sacrée. Catherine Salles nous rapporte dans son article que : « Hérodote affirme que les femmes des Babyloniens doivent s'unir une fois dans leur vie à un homme étranger dans le temple de la déesse Belit-Ishtar. »

Belle, avec de bonnes manières et instruite, l'hétaïre grecque est l'équivalent de la geisha. « Les hétaïres, nous les avons pour le plaisir, les concubines pour les soins de tous les jours, les épouses pour avoir des enfants légitimes et garder fidèlement le foyer » disaient souvent les auteurs anciens. (Et dire que la femme d'aujourd'hui fait tout ça en plus de travailler!!!)

À Pompéi, capitale du plaisir, dans l'intimité d'un lupanar Vénus reçoit tous les honneurs de son culte. Ces chics bordels sont organisés méticuleusement pour que les prostituées esclaves qui y sont assignées exercent leur métier.

À la fin du Moyen-Âge, le croiriez-vous, la prostitution est acceptée et légalisée. Toutes les grandes villes possèdent leur quartier réservé. L'Église pouvait vous brûler pour sorcellerie, athéisme ou hérésie mais elle semble avoir été beaucoup plus tolérantes pour la bagatelle.

C'est à partir des années 1680 que Louis XIV sonne le glas du libertinage. Dès lors, toutes les mesures sociales sont prises pour éradiquer ce « fléau ». Sous l'influence d'un parti dévot, le roi va pourchasser les filles publiques sans relâche. Prison, humiliation, déportation, rien n'y fait, la prostitution ne recule pas. Le XIXe siècle va voir apparaître les maisons closes et les artistes qui rehaussent leur réputation. Mais les filles publiques sont maintenant doublement régentées par la police et la maquerelle. La profession se diversifie : la demi-mondaine, la lorette, la grisette, la fille en carte, la fille de brasserie, la belle de jour, l'insoumise autant de catégories pour autant de classes sociales.

Au XVIIIe Restif et Ledoux, romancier sulfureux et architecte visionnaire vont même créé le bordel utopique. Un établissement grandiose où on a aménagé les lieux et les conditions de travail qui laisserait rêveuse les filles de la rue Saint-Denis : Quart de travail de 8 heures, le dimanche chômé, un dispensaire et une maison de retraite Un cadre d'une philosophie audacieuse où la prostituée pourrait enfin exercer son métier dans des conditions honorables avec la sécurité sociale. On peut toujours rêver.

Jusqu'en 1946, les maisons closes étaient légales. On décida alors de les fermer. Un an plus tard, on recense 200 lupanars clandestins. Aujourd'hui on parle de trafic humain, d'exploitation sexuelle et de tourisme sexuel que les frontières ne protègeront désormais plus. 122 gouvernements se seraient engagés à sévir contre cette dérive. Les prostituées manifestent contre la loi Sarkozi. Mais l'Internet a pris la relève... dur dur d'imposer la chasteté aux masses...

 

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Adorable au summum #120 – février 2007

 

Cette revue est principalement destinée à la génération montante des femmes, les 15-25 ans, celles à qui le combat de leurs aïeules a déroulé le tapis rouge du succès. Oubliez la revue ELLE et tous ces illustrés ringards qui ne présentent à la femme que ses devoirs esthétiques. Adorable au Summum miroite une image mirobolante de la jeune femme moderne en quête de réussite. Astrologie mais aussi gadget techno ; rouge à lèvres mais aussi sportives musclées ; potins de Hollywood mais aussi beau mec déshabillé au discours qu'elles veulent entendre ; bain moussant mais aussi femme au gym ; trucs psycho et... spécial Saint-valentin. Couple ouvert, lingerie féminine érotique, vêtements sexy, yoga sexy, pratiques sado-maso, le bel Antonio, les résolutions sexuelles et un hommage à leur clitoris (article contre l'excision en pays étranger). On n'a rien oublié même que, à la toute fin du magazine, sous un titre non indexé et différent de celui de la page couverture (a-t-on hésité?), on a osé publier l'article d'un vrai homme qui leur dit pourquoi les mecs ont « peur de l'engagement ».

Cette revue m'a rappelé le sens Deleuzien du désir, celui qui s'exprime non pas par le manque mais par l'affirmation. Notre société est en train de vivre une mutation profonde nous le savons tous. Mais comment s'articule-t-elle. Quels en sont les ressorts? Le désir est vu par les bouddhistes comme le sexe chez les catholiques. Un manque contre lequel il faut tout faire pour ne pas céder. Résister au désir comme la vierge résiste au sexe, était l'ancien schéma. Mais Gilles Deleuze nous a proposé une toute autre façon de concevoir le désir. Il nous propose le désir, non pas comme un vide à remplir, mais plutôt comme une volonté active de s'exprimer. Pour Deleuze, on affirme son désir. Vision très phallique s'il en est : le désir, non pas comme une femme passive attendant d'être comblée, mais comme un homme actif allant se donner satisfaction  éjaculer, prendre, et non recevoir. Absolument Adorable montre que dans nos mœurs, que l'on soit homme ou femme, notre sexualité est essentiellement devenue « masculine » le désir rime avec prendre sa vie en main ; se dépasser ; s'exprimer, réussir.

 

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7 – R I R E   E T   S ' A T T E N D R I R

 

 

 

 

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Maintenant, que penseriez-vous de cette photo si les rôles étaient inversés? Si vous avez moins de 35 ans, votre opinion m'intéresse véritablement puisque j'en aurai 52 ce mois-ci.

 

 

 

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8 – P E N S É E    D U   M O I S

Il en est de la lecture comme des auberges espagnoles ; on n'y trouve que ce que l'on y apporte.

 

Pierre Billon (Citation No. 338)

 

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9 P O U R   L E S   N O U V E A U X   P A R T I C I P A N T S

 « Philo sans fumée » est le bulletin mensuel de Philo5.com. Vous êtes cordialement invité à y répondre en m'écrivant. vos réflexions. C'est un plaisir pour moi de vous lire.

 

François Brooks

 

 www.philo5.com

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