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Voler des vies

par François Brooks

Si on calcule qu'une vie de 80 ans (espérance de vie moyenne) compte (364¼×80) 29,220 jours de 24 heures, celle-ci dure 701,280 heures. Faisons un chiffre rond : disons qu'une vie moyenne compte 700 milles heures.

 

Si je parviens à accaparer 700,000 heures chez mes semblables, j'aurai donc « volé » une vie. Compte-tenu du fait que la planète compte 6.240 milliards de personnes (http://www.ibiblio.org/lunarbin/worldpop), si je réussis à attirer l'attention de 10% des gens de la planète pendant 4 secondes seulement, j'aurai volé une vie.

 

(6,240,000,000 × 10% = 624,000,000 personnes)

(624,000,000 × 4 sec. = 2,496,000,000 secondes)

(2,496,000,000 ÷ 3,600 = 693,333 heures) ou environ une vie.

 

De cette façon, inutile de tuer qui que ce soit pour s'emparer d'une vie ; il suffit de trouver une action qui intéresse beaucoup de gens.

 

De ce point de vue, on pourrait comptabiliser le nombre de vies qu'ont prises certaines personnes célèbres comme les Beatles, le pape ou un enseignant. Un professeur qui enseigne pendant 30 ans à raison de deux sessions de 45 heures par année à une classe de 30 élèves et à 3 groupes par session aura accaparé un peu plus du tiers d'une vie d'autrui. Et si on calcule que chaque élève doit mettre 2 heures de travail personnel pour chaque heure de cours suivi, l'enseignant aura accaparé une vie complète dans sa profession.

 

Les Beatles qui ont vendu des disques à profusion ont attiré l'attention de centaines de milliers de vies et continueront encore de le faire longtemps après leur mort.

 

Mais le record appartient à qui? Jésus Christ? Peut-être. Il serait intéressant de créer un palmarès de popularité en chiffrant celle-ci au nombre de vies volées pour une seule vécue.

 

Dans les voleurs de vies, il y a tous ceux qui cherchent à vous vendre quelque chose ou simplement solliciter votre attention pour rien. Pensez-y. À chaque fois qu'un courriel envoyé massivement sollicite l'attention de millions de personnes pour quelques minutes, ce sont des vies qui s'envolent inutilement. On comprend pourquoi certaines gens s'irritent lorsqu'on les sollicite inutilement. C'est une partie de leur vie qu'on leur vole.

 

La personne qui se suicide dans le métro à l'heure de pointe, en plus de « scraper » sa propre vie, en aura entraîné avec elle une autre si elle provoque une heure de retard pour 700 milles personnes. Nous mourrons tous un peu avec elle.