PHILOSOPHIES DE LA NATURE 

Anaximandre

 

Texte fondateur

Date inconnue

Ont dit sur Anaximandre [1]

Fragment

« [...] l'Illimité est le principe des choses qui sont. [...] Ce dont la génération procède pour les choses qui sont, est aussi ce vers quoi elles retournent sous l'effet de la corruption, selon la nécessité. » [2]

* * *

« Ce d'où il y a génération des entités, en cela aussi se produit leur destruction, selon la nécessité, car elles se rendent les unes aux autres justice et réparation de leur injustice, selon l'assignation du Temps. » [3]

* * *

Parmi ceux qui disent que l'élément est un seul et en mouvement et infini, Anaximandre, fils de Praxias de Milet — successeur et disciple de Thalès — déclara l'infini à la fois principe et élément des choses qui sont, et fut le premier à introduire ce nom de « principe » (archè). Or il dit que le principe n'est ni l'eau, ni aucun autre de ce qu'on appelle les éléments, mais une certaine nature infinie différente, d'où naissent tous les ciels et les mondes qu'ils contiennent. « Les choses hors desquelles est la naissance aux choses qui sont, par ailleurs, sont celles vers quoi se développe aussi la ruine, selon ce qui doit être : les choses qui sont, en effet, subissent l'une de l'autre punition et vengeance pour leur injustice, selon le décret du Temps » : il expose ceci en ces termes plutôt poétiques. Il est clair qu'Anaximandre, ayant observé la transformation des quatre éléments l'un dans l'autre, estima qu'il était infondé de poser un seul de ces éléments comme substrat (upokeimenon), et pensa au contraire établir comme tel quelque chose d'autre au-delà des éléments. Il relie en outre l'engendrement non pas à l'altération de l'élément, mais à la séparation des contraires à travers le mouvement éternel. [4]

* * *

« Toutes choses ont racines l'une dans l'autre et périssent l'une dans l'autre, selon la nécessité. Elles se rendent justice l'une à l'autre, et se récompensent pour l'injustice, conformément à l'ordre du temps. » [5]

* * *

« Selon lui [Anaximandre]. la naissance des choses n'advient pas par altération du principe élémentaire, mais elle advient par la séparation des contraires, selon le mouvement éternel. » [6]

[1] Aucun texte original ne nous est parvenu. Anaximandre de Milet fut l'élève de Thalès et lui succéda à titre de maître de l'école ionienne. Nous le connaissons grâce à certains philosophes, doxographes et historiens dont Simplicius et Théophraste qui citent l'unique fragment controversé reproduit ici dans quatre traductions différentes.

[2] Simplicius, Commentaire sur la physique d'Aristote.
Extrait de Peter Kunzmann, Franz-Peter Burkard et Franz Weidmann, Atlas de la philosophie, La Pochothèque - Le Livre de Poche © 1993, p. 31.

[3] Simplicius, Commentaire sur la physique d'Aristote (24, 13).
Extrait de http://fr.wikipedia.org/wiki/Anaximandre.

[4] Théophraste, Fragment A9 (Colli 11 [B1]), Opinions des physiciens, fragment 2,
traduction G. Colli, in La Sagesse grecque, Édition de L'Éclat, 1997.
Extrait de Catherine Golliau, La Pensée antique, des présocratiques à saint Augustin, Thallandier © 2006.

[5] Anaximandre, Sur la nature.
Fragment cité par Simplicius, in Commentaire sur la physique d'Aristote (24, 13).
Extrait de Carlo Rovelli, Anaximandre de Milet ou la naissance de la pensée scientifique, Dunod © 2009, p. 37.

[6] Simplicius, extrait de Ibid, p. 70.

Philo5
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