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Société au service des faibles

par François Brooks

Je sais que mon sentiment va en horripiler plusieurs, et surtout ceux qui ont le souvenir blessé du temps des Nazis mais ne serions-nous pas tombés dans l'autre extrême? À force de vouloir expier ce souvenir d'un temps où on envoyait à l'abattoir tous les éléments que l'on jugeait improductifs, ne serions nous pas tombés dans l'excès inverse de surprotéger les faibles au détriment des forces vitales de notre société?

 

Un exemple? : Je suis un travailleur de 44 ans qui est soumis à un stress thermique constant : je travaille de nuit dehors à réparer des luminaires. L'hiver, je sors et je rentre dans mon camion nacelle chaque nuit vingt fois. De ce fait, je suis exposé à des variations de température très fréquentes. J'ai beau, comme tout travailleur, cotiser pour l'Assurance maladie chaque semaine, mais je n'ai pas droit au vaccin annuel contre la grippe à moins de payer un supplément de 35$. Cette restriction m'est imposée parce que je ne suis pas un vieillard, ni un enfant, ni une femme enceinte.

 

Si j'étais assisté social et malade, j'aurais droit aux médicaments gratuitement. Je suis un élément fort et productif de cette société à laquelle je contribue par mon travail quotidien et mes cotisations. Pourtant, celle-ci ne cherche pas à me protéger ne serait-ce qu'au même titre que ceux que mon salaire indispensable fait vivre. On me surtaxe. Où sont les soins universels de santé si ceux-là mêmes qui cotisent en sont partiellement exclus au profit de ceux qui ne cotisent pas?

 

J'en conclus que nous vivons dans une société malade qui ne sait plus qu'elle doit protéger ses travailleurs plus que tout autres. Nos racines chrétiennes nous font éprouver de la compassion pour les indigents et c'est très bien. Mais, dans cette époque de compressions budgétaires, comment ferons-nous, justement, pour générer les ressources dont nous avons besoin pour venir en aide aux indigents si nous ne pensons pas d'abord à protéger ceux qui produisent ces ressources? À avantager les faibles, une société envoie le message à ses éléments qu'il vaut mieux être pauvre et malade que riche et en santé. Cette mentalité suicidaire vaut-elle vraiment mieux que la mentalité assassine des Nazis? Oui. Elle permet aux imbéciles qui nous gèrent de se donner bonne conscience. Quant à savoir s'ils pourront encore le faire longtemps...