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Question pour une théologienne

par François Brooks

Bonjour, madame Lefebvre.

 

J'ai vu, il y a quelques semaines, le reportage qu'on a fait sur vous à l'émission Second regard et votre témoignage a attiré mon attention. Vous y avez utilisé le mot sens à quelques reprises et je me suis senti en accord avec ce que vous disiez. Si la foi doit être porteuse de sens, elle doit être d'une grande utilité. Mais les institutions qui la véhiculent ne vont-elles pas parfois à l'encontre de la foi. Aussi, j'ai une question à vous poser à cet effet mais, avant, permettez-moi de me présenter.

 

J'ai 44 ans et mon père avait laissé la prêtrise juste avant de faire ses vœux pour se marier. (Il est décédé tout juste avant ma naissance). Ma mère nous a élevés dans la foi et, comme tout bon bébé boomer, dès l'adolescence, j'ai eu une ‘indigestion' de catholicisme et j'ai abandonné toute pratique religieuse.

 

Lorsque, il y a 4 ans, je terminais mon DEC, les questions de la foi se sont mises à m'intéresser par le biais des philosophes. J'ai voulu approfondir cet intérêt animé de la certitude que si René Descartes lui-même était croyant, ça valait la peine que j'essaie au moins de comprendre pourquoi. J'ai lu tout ce que j'ai pu trouver sur les philosophes (86 philosophes) en portant une attention spéciale sur leur rapport avec la foi. J'ai aussi inclus dans mon intérêt ceux qui étaient athées puisque j'estime que nier l'existence de Dieu est encore une façon de lui donner une place dans notre pensée. Je pense pouvoir affirmer maintenant que j'ai trouvé une forme de foi qui est en accord avec ma pensée, mais...

 

Il y a 20 ans, j'ai lu la bible d'un couvert à l'autre. Récemment, comme pour essayer de m'y remettre, je suis tombé sur un opuscule intitulé Quarante mots clés pour entrer dans la Bible.

 

Voici ma question pour vous :

 

Pourquoi la religion chrétienne, qui se veut rationnelle lorsqu'elle appuie son enseignement sur des lieux historiques, des dates relativement précises, des faits politiques, historiques etc. , pourquoi, à l'opposé, introduit-elle des dogmes de foi qui sont en quelque sorte une insulte à l'intelligence.

Je donnerai pour exemples une vierge qui enfante, un mort qui ressuscite, de l'eau changée en vin, une vie éternelle après la mort etc.

Pourquoi faut-il que la foi chrétienne s'ancre dans des artifices fabuleux? Ne nuit-elle pas à ses propres objectifs de propagation en ajoutant à son message une partie fantastique peu crédible? L'homme serein, intelligent et bien intentionné ne peut-il pas entretenir une foi en accord avec sa rationalité sans devoir être troublé par de telles absurdités?

 

J'espère que vous aurez quelques minutes pour me répondre et alimenter ma réflexion. J'aimerais en faire la base d'une nouvelle démarche dans mes recherches. En effet, je serais intéressé à suivre un cours en Théologie comme auditeur libre. (Auriez-vous quelques suggestions pour moi?)

  

François Brooks

 

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Réponse de la théologienne

 

Monsieur Brooks,

 

Vos questions sont pertinentes. Elles offrent un tremplin de questionnement pour suivre quelques cours de théologie. Vous exprimez les ambivalences de tous les modernes, à l'égard du rapport entre modernité et foi. Par ailleurs, les religions ne fondent paradoxalement pas leurs croyances uniquement sur des faits. Ce type d'argumentation est justement un fruit de la modernité rationnelle. Quant au dogmatisme, la théologie contemporaine le vise dans ses critiques fondamentales. Cf Claude Geffé, Le christianisme au risque de l'interprétation, Paris, Cerf.<

Bien à vous

Solange Lefebvre

 

P.S. Quant aux cours de théologie, adressez-vous au secrétariat d'une faculté non loin de chez vous. Regardez la banque de cours, les options, consultez, soumettez votre dossier. Vous finirez bien par trouver ce qui vous convient.