090831

L'art du questionnement philosophique [1]
    4e Séminaire d'été d'Oscar Brenifier

par François Brooks

Aimez-vous les questions? Préférez-vous les poser ou y répondre? Et que diriez-vous de m'accompagner à un séminaire sur l'art du questionnement philosophique dans un des décors les plus enchanteurs de France?

Comment avons-nous pu, pendant toute une semaine sortir de notre état mental affirmatif et penser en terme de questionnement? Est-ce le décor qui nous a aidé ou est-ce le génie d'Oscar Brenifier qui, après nous avoir invité à pratiquer l'agôn nous mit en garde contre les exigences? Jeu? Compétition? Agonie? Est-on prêt à se découvrir sous le regard interrogatif d'un Brenifier qui accouche notre être qui va naître devant 38 personnes venues de 14 pays? Seriez-vous moins timoré à l'idée que vous ne reverrez peut-être jamais ces gens sympathiques, vacanciers philosophes, prêts à offrir un regard neuf et impartial sur ce que vous êtes?

Une question nécessite-t-elle toujours une réponse? Peut-on questionner une question? Combien de poupées russes sont imbriquées dans la question : « Does a teacher speaks only to defend himself? »?

  1. Un enseignant parle-t-il seulement pour se défendre?

  2. Est-ce qu'un enseignant doit se justifier?

  3. Est-ce que tous les enseignants éprouvent des doutes sur leurs connaissances?

  4. Pourquoi serait-il interdit de réfuter leurs enseignements?

  5. L'enseignant fait-il autre chose que de parler pour informer ses étudiants?

  6. Quelle différence y a-t-il entre un fait, une théorie, un dogme et une possibilité?

  7. Les enseignants sont-ils piégés par leurs croyances?

  8. ...

Quelles sont les questions que vous aimeriez ajouter?  Quel type de discours allez-vous adopter pour répondre à ces questions? Des trois types de discours, préférez-vous l'assertif (affirmation), l'apodictique (nécessité) ou le problématique (possibilité)?

Quel est votre mode de pensée le plus courant?

  1. Nécessaire?  Mais comment vous sentez-vous à voir vos assertion détruite par une seule exception?

  2. Possible? Êtes-vous plus à l'aise dans le « peut-être » où une seule possibilité vous donne raison?

  3. Probable? Ou vous sentez-vous l'esprit démocratique d'une majorité variable (rare, souvent, parfois)?

Y a-t-il des questions meilleures que d'autres? Une question peut-elle être rude? Si Brenifier affirme que la confusion est le tremplin de la coexistence philosophique vous sentirez-vous plus libre d'accepter le jeu du questionnement?

Et après mille questions je me suis demandé : Pourquoi n'ai-je aucune question à poser à propos de l'atelier de ce matin? Était-ce une question de trop? Le silence bienfaiteur du calme mental m'indiquant que j'avais enfin échappé aux discours assertif, apodictique et interrogatif n'était-il pas le but ultime, comme le jogging salutaire qui fait battre mon cœur vite pour rien mais n'en aboutit pas moins à une subséquente relaxation bienfaitrice?

Mais n'y aurait-il pas plus, beaucoup plus? Quand la question rebondit sans cesse, ne suis-je pas plus présent aux autres?  Et réciproquement, quand je réponds à leurs questions, n'ai-je pas la magnifique sensation d'exister pour eux? Parce que, après tout, une fois mes besoins essentiels assurés, que puis-je demander de plus satisfaisant que d'exister pour les autres? Mais si j'existe, suis-je qui je pense être? Lorsqu'on me renvoie une autre image de moi-même que celle que j'attends, ne suis-je pas confronté, déçu, choqué, esseulé, rejeté? Mais comment puis-je exister pour les autres en leur posant l'exigence de me renvoyer l'image que je pense être sans m'isoler davantage? Le coût de l'existence serait-il d'être ce que les autres perçoivent de moi?

 Et si le mode interrogatif était simplement un état d'esprit, accepteriez-vous de l'adopter comme Socrate l'avait fait pour accoucher la pensée de ses concitoyens? Nous sommes nés dans des corps, notre pensée ne serait-elle qu'un perpétuel accouchement de notre être? Et pour rester vivant l'état d'esprit interrogatif n'est-il pas le plus approprié? L'art du questionnement d'Oscar Brenifier serait-il l'art de donner à notre vie une valeur ajoutée?

[1] Le séminaire donné par Oscar Brenifier et Isabelle Millon s'est déroulé du 13 au 19 juillet 2009 dans le magnifique village de La Chapelle-Saint-André, en Bourgogne, France. Plus de 40 personnes étaient présentes, enfants et adultes, provenant de 14 pays (Portugal, Espagne, France, Hollande, Belgique, Italie, Croatie, Israël, Arabie, Algérie, Islande,  Angleterre, Canada, États-Unis) et de milieux professionnels variés (enseignants, psychanalyste, étudiants, artisans, managers, massothérapeute etc.). Les ateliers se déroulent en anglais, mais on y pratiqua une grande ouverture sur les autres langues.

Philo5
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